A l’heure à laquelle j’écris cet article, il y a de plus en plus de personnes qui se lancent dans la création de compléments alimentaires. De part mon statut professionnel (gérant eCommerce de SuperPhysique Nutrition et co-fondateur de la gamme de suppléments SuperPhysique), j’ai été amené plusieurs fois à conseiller des entrepreneurs qui me demandent comment créer leur marque de suppléments alimentaires. C’est pourquoi je vais vous expliquer comment se déroule réellement la création de suppléments alimentaires.
La plupart de ces ambitieux, entrepreneurs motivés et bien souvent encore un peu naïfs, s’imaginent pouvoir faire des miracles (et en vivre) en lançant une gamme de complément alimentaires qui proposera des produits uniques sur le marché de la nutrition sportive. Des produits bien étiquetés, avec des dosages conséquents qui promettraient toujours plus de résultats. Aujourd’hui une minorité souhaite des produits sans arôme, sans additif, sous gélules vegan, sans OGM, le tout made in France, avec ainsi toujours plus de gages de qualités, quand d’autres ne veulent que du goût.
La volonté est bien là, l’idée aussi, sauf que techniquement et juridiquement c’est bien moins évident que ça n’y parait, et même d’excellentes idées ne peuvent pas toujours être mis en pratique comme on le souhaiterait.
Dans cet article nous verrons comment se passe réellement la conception de suppléments alimentaires et quelles sont les contraintes rencontrées lors de la conception et de la fabrication.
Sommaire de l'article :
COMMENT CRÉER SA MARQUE DE SUPPLÉMENTS ALIMENTAIRES ?
Comment créer sa marque de suppléments alimentaire en podcast audio
Avoir l’idée d’un supplément alimentaire
Premièrement il faut bien évidemment avoir l’idée d’un supplément alimentaire : un brûleur de graisse, un gainer, une protéine en poudre, un multi-vitamines, un super-aliment, que souhaitez-vous faire et pourquoi ?
Cette idée, tout le monde l’a et j’entends régulièrement des influenceurs vouloir se transformer en Joe Weider (pionnier de la fabrication de compléments alimentaires – cf. histoire du dopage en musculation) le temps de la conception d’un brûleur de graisse. Le marché semble attractif et rémunérateur, il y a une forte motivation depuis l’avènement des réseaux sociaux pour le développement et la fabrication de compléments pour les pratiquants de fitness et de musculation.
Partant de cette idée de départ, il vous faut une composition. Je ne vais pas rentrer dans les détails du travail de recherche que cela implique, mais chacun y va de sa manière.
Certains font du copier-coller de compléments existants quand ils n’y connaissent rien du tout, d’autres se laissent conseiller par leur laboratoire, d’autres encore font leurs propres recherches et agissent en fonction de leur propre expérience (comme nous le faisons pour les suppléments SuperPhysique).
Soyons honnêtes, en réalité sur le marché actuel, une majorité d’entrepreneurs font des répliques de produits existants, certainement avec pas mal de lacunes sur la composition et sur les ingrédients, en travaillant habituellement en « marque blanche* » avec des fabricants historiques dans ce domaine. D’autres investisseurs se débattent pour façonner des suppléments qualitatifs qui ont de l’utilité et une raison d’être et cela passe parfois inaperçu malgré les efforts.
*Une marque blanche est un service ou un produit conçu par une entreprise (le « producteur »), que d’autres entreprises (les « distributeurs ») reprennent à leur compte et commercialisent sous leur propre marque.
Le laboratoire – le façonneur
Deuxièmement, il faut trouver votre laboratoire – le façonneur – qui sera soit à l’étranger, soit en France, tout dépendra de votre budget et des devis que l’on vous proposera selon vos propres recherches.
Un laboratoire étranger peut être plus en difficulté quant à la légalisation et aux contrôles des suppléments misent en vente sur le marché Français.
Même si les frontaliers sont également en Europe, chaque pays à ses propres règles en matière de suppléments alimentaires et de contrôles (dosages différents, moins de restrictions de certains ingrédients). Tous ne sont pas toujours prompts à vous aider dans l’enregistrement de vos suppléments auprès de la DGCCRF Française (tout dépendra des suppléments que vous ferez fabriquer qui ne sont pas soumis aux mêmes réglementations).
Il n’y a pas d’échappatoire, et que vous vous échappez de France pour des raisons bien particulières qui sont propres à vos investissements de départ, les règles s’appliqueront tant que vos produits seront vendus en France. De ce fait, s’ils ne sont pas conformes à la réglementation en vigueur dans le pays de la vente, les suppléments pourront être saisis par la DGCCRF s’ils sont amenés à être contrôlés.
La composition des suppléments alimentaires
Une fois la composition donnée au laboratoire, celui-ci étudie la faisabilité et la légalité de cette dernière.
Si le laboratoire n’a pas fourni une composition toute faite (certains proposent des marques blanches comme expliqué précédemment) il analysera chaque ingrédient, leurs coûts, et leurs disponibilités (matière première).
Les dosages doivent être maîtrisés !
Il n’est pas question de façonner un multivitamines en mettant n’importe quel dosage, de n’importe quel ingrédient, même si vous êtes un génie de la nutrition et que vous pensez avoir trouver le bon équilibre avec des calculs scientifiques de vos quantités. Chaque ingrédient, chaque dose est contrôlée, et régie par des lois nationales et Européennes.
Si vous ne respectez pas ces dosages, le laboratoire n’autorisera pas la fabrication, car ledit supplément ne saura être enregistré auprès de la DGCCRF.
Si les compléments sont en gélules, il y a évidemment toute une stratégie à mettre en place pour créer le dosage idéal en fonction de la capacité de la gélule (capacité des gélules également très réglementée), au risque que le consommateur ne se retrouve à devoir avaler 15 gélules par jour pour avoir la bonne dose, ce qui peut vite devenir très contraignant. Cette stratégie sera élaborée conjointement avec votre laboratoire, à vous de décider des finalités de fabrication selon vos besoins (en soi cela peut paraître un détail, pourtant c’est plus contraignant que ça en a l’air et peut modifier une partie de la composition que vous aviez élaboré initialement).
L’étiquetage des compléments alimentaires
Une fois le devis validé, si la tarification vous convient, si la composition est actée, vous devrez créer l’étiquette du produit, qui, une fois encore relève d’un événement surnaturel. Hors de question de laisser aller vos talents d’artiste et d’imprimer l’étiquette qui vous fait rêver.
L’étiquette (le design – les images – les logos) doit correspondre à la réglementation Française et Européenne. Vous ne pouvez pas utiliser n’importe quelle photo, n’importe quelle image pour valoriser vos compléments. Certaines images pouvant être trop explicites ou assimilées à des allégations santé (par exemple une photo d’un homme affichant une sangle abdominale dessinée ne sera pas valide pour orner le contenant d’un brûleur de graisse).
Toutes ces étapes sont contrôlées et vérifiées juridiquement par un service adéquat et/ou indépendant de votre laboratoire, sans quoi vos suppléments ne seront jamais autorisés à la vente… à cause d’une image.
Pourtant je vous l’accorde il existe un tas de suppléments étiquetés de façon très imagés, affichant des bodybuilders dopés et explicitant indirectement les effets souhaités du produit. Si c’est le cas, ces suppléments sont fabriqués par des laboratoires étrangers, notamment Américain, ou des pays Européens tel que l’Allemagne un peu plus laxiste sur la réglementation (à l’effigie des produits de la marque du défunt bodybuilder Rich Piana – 5% Nutrition).
Les allégations santé
Le texte apposé sur l’étiquette de votre supplément alimentaire figure lui aussi dans la liste des contrôles et des restrictions que vous aurez à gérer.
Vous ne pouvez pas afficher n’importe quoi sur vos jolies contenants. Pensant devenir millionnaire avec vos phrases d’accroches tout droit sorties de l’école de commerce, vous serez tout juste amené à accepter le peu de marge qu’il vous restera pour mettre en avant vos compléments. Chaque mot, chaque allégation santé est commanditée par l’Union Européenne, et vous pourrez ainsi utiliser uniquement ce que l’EU a autorisé sur un site accrédité pour ce service bien spécifique (autrement dit quasiment rien).
Par exemple, il est interdit de dire que la glucosamine a des bienfaits sur l’arthrose, même si les médecins en recommandent et que bons nombres d’études scientifiques à ce jour certifient ces effets positifs. Cette allégation n’est pas autorisée, il est donc interdit d’utiliser ces propos pour vendre un supplément à base de glucosamine.
L’enregistrement des compléments auprès de la DGCCRF
Une fois toutes ces conditions créées (composition, étiquette, nom du produit, dosage, etc.), un dossier est constitué pour chaque nouveau supplément alimentaire (cela dépend du type de produit, tous ne sont pas soumis à cet enregistrement) puis envoyé au service des Fraudes Français pour analyse et acceptation (ou non) du dit supplément.
Sans enregistrement au préalable des nouveaux compléments au service des fraudes, ceux-ci sont considérés comme invendables. Seulement et seulement si la DGCCRF ne conteste pas leur enregistrement, ceux-ci peuvent être commercialisés sur le territoire national.
Le dossier en question contient toutes les informations précises des suppléments, compositions, ingrédients, dosages, informations sur le laboratoire fabricant etc. En règle générale les laboratoires sont compétents pour vous aider ou prendre complètement à leur charge l’édition de ces formulaires administratifs qu’il ne vous restera plus qu’à signer.
Le façonnage des compléments alimentaires
Enfin, vient le temps de remplir ces belles boites fraîchement designées !
Une fois la composition passée entre les mains d’experts du laboratoire et des services juridiques compétents, vient le temps du façonnage dans les règles de l’art et du remplissage de vos emballages (que vous aurez au préalable choisi avec soin selon vos besoins – choix qui est propre à chaque laboratoire).
Des contrôles internes sont effectués à tous les niveaux de la fabrication pour ne laisser aucun hasard quant à la qualité du contenu de vos suppléments alimentaires, qu’ils soient sous forme de gélules, de comprimés ou de poudre. Analyses bactériologiques, physico-chimiques, études de stabilité, dosages d’actifs, contrôles de substances indésirables, dosage des métaux lourds, contrôle de la teneur en HAP, etc.
Les façonneurs travaillent eux-mêmes avec des laboratoires spécialisés dans leur domaine pour vous proposer les analyses adaptées à votre produit. Là encore, si vous vous entourez de gens compétents, vous n’aurez pas besoin d’intervenir dans ce processus.
COMMENT CRÉER SA MARQUE DE SUPPLÉMENTS ALIMENTAIRE – CONCLUSION
La création de suppléments alimentaires relèvent plus de l’ordre administratif des législations et des règlements nationaux et Européens, que de l’ordre de la recherche et du développement (comme peut-être vous pensiez les concevoir avec une certaine inspiration et une certaine indépendance). Vous l’aurez compris, vous ne faites pas ce que vous voulez et vous êtes encore moins libre que ce que vous imaginiez. Quand bien même vous avez des idées bien arrêtées, et une expérience dans la nutrition, vous serez contraint de respecter des règles et des normes contraignantes que le laboratoire ne tardera pas à vous rappeler.
La critique est facile, et beaucoup de consommateurs pensent à tort que l’on peut mettre ce que l’on veut, aux doses souhaitées, alors que tout est contrôlé, maîtrisé au milligramme prêt et imposé par la législation Européenne (de fortes doses n’ont d’ailleurs jamais signifié une meilleure efficacité).
Il y a autant de contrôles et de contraintes sur l’étiquetage et sur l’externalisation des produits, que pour la conception des compositions des suppléments. Les réglementations régissant les dosages ne peuvent être contournées et personne ne peut vendre un supplément en France avec un dosage parce que celui-ci lui semble bon. Il en sera de même pour la réalisation de vos étiquettes.
Le fabricant a la liberté de réduire ses doses, mais en aucun cas il ne pourra augmenter ses doses au-delà de ce que la réglementation lui autorise. Le bon dosage relève donc avant tout de l’utilisation du bon ingrédient (sous sa bonne forme – la plus digeste – la plus qualitative) et de la bonne posologie. Il est bon de rappeler qu’il existe plusieurs formes d’ingrédients. Par exemple vous retrouverez plusieurs formes de créatines (nous conseillons toujours la créatine monohydrate). Il existe aussi plusieurs sources de magnésium procurant des dosages différents, dont certaines sont moins digestes (et moins efficaces) que d’autres. Ainsi 3 grammes d’oxyde marin de magnésium ne contiennent pas autant de magnésium que 3 grammes de bisglycinate de magnésium. En tant que consommateur c’est sur ces points précis, que vous pourrez finalement juger de la qualité d’un supplément plus que sur toute autre chose (cf. pour en savoir plus mon article sur les meilleurs suppléments alimentaires en musculation).
La différence de qualité que l’on retrouve réside donc dans le fait d’acheter des marques qui ne font que copier-coller des compositions déjà existantes, en proposant des ingrédients peu qualitatifs, sous des formes peu digestes, en les sous dosant pour augmenter leur marge. C’est tout l’inverse de l’engagement de la marque SuperPhysique qui a usé de son expérience et de ses capacités pour créer de la qualité avant tout.
La réglementation en vigueur
Au niveau français
- Le décret français 2006-352 relatif aux compléments alimentaires.
Au niveau européen
- La directive 2002/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 10 juin 2002 relative au rapprochement des législations des États membres concernant les compléments alimentaires.
- Le règlement INCO 1169/2011.
Les allégations santé autorisées
- Le règlement 1924/2006 du 20 décembre 2006 concernant les allégations nutritionnelles et de santé portant sur les denrées alimentaires.
Les plantes autorisées
- L’Arrêté du 24 juin 2014 établissant la liste des plantes, autres que les champignons, autorisées dans les compléments alimentaires et les conditions de leur emploi dit « arrêté plantes français ».
Dernière mise à jour de l’article le 27 novembre 2020.
50
Leave a Comment