Combien de temps accorder à la rentabilité de son entreprise ? Un sujet inspiré de vos récentes réactions et commentaires (faisant suite à l’arrêt de l’édition de la newsletter SP), ainsi que le leadercast – « TEMPS » de Rudy (dans lequel il me cite en exemple) qui ont largement contribué à cet article sur la réalité de l’entrepreneuriat et du temps qu’il faut pour réussir à rentabiliser son entreprise. Cette réflexion rejoint ainsi la conclusion que je faisais dans la newsletter publiée sous l’intitulée : «The End» pour ceux qui sont abonnés à la newsletter.
Je parlerai ici de notre capital temps (notamment de nos propres dépenses en heure de vie) qui n’est pas illimité et que nous consommons à chaque fois que nous consacrons du temps (rémunéré ou non) à quelqu’un. Du temps que certains d’entre nous accordent aux autres, parfois directement ou indirectement, via leur domaine professionnel ou même personnel de façon gratuite et parfois sans aucun retour, sans jamais de remerciements.
C’est un sujet qui peut s’apprêter à bien des domaines d’activités économiques et de plus en plus aujourd’hui au travers des activités commerciales en ligne ou la demande de conseils gratuits est croissante. Enfin je pense au domaine associatif où il est habituel de rencontrer des personnes bénévoles offrant leurs heures de vie à s’occuper de documents administratifs, d’encadrements sportifs et autres tâches d’entretien, même si étroitement ces activités sont parfois liées à leur entreprise, le bénéfice engendré n’est pas toujours évident à définir.
Sommes-nous rémunérés à la hauteur de ces efforts ? Que gagnons nous?
Pour certains c’est très compliqué d’avoir un retour sur investissement, même si ces efforts sont liés à un commerce (et nous verrons pourquoi en conclusion). Dans cet article nous verrons quels investissements j’ai réalisé depuis 16 ans d’entrepreneuriat, pour quelle finalité et ce que nous pouvons en tirer comme leçon.
Sommaire de l'article :
COMBIEN DE TEMPS ACCORDER A LA RENTABILITÉ DE SON ENTREPRISE, LA RÉALITÉ
Rapide historique
Pour refaire le cheminement qui explique mon article « The End »(expédié via la newsletter) je dois revenir au début de mon histoire professionnel, et pour une fois je ferais de la discussion de comptoir en dévoilant un peu de ma vie privé, avec une conclusion somme toute utile.
J’ai commencé à mon compte à 20 ans, à la sortie de l’Université avec 1000 € en poche. De cette petite ligne synthétisée, va suivre presque 9 ans d’activité entrepreneurial au sein de ma propre structure commerciale. Pour être exact, j’ai lancé mon entreprise en 2005 (commerce physique + commerce en ligne) pour changer d’activité en 2013 et collaborer depuis avec SuperPhysique.
Je resitue l’histoire car en fait, tout à commencer ici, précisément en 2005, où sûrement avec beaucoup d’inconscience et de naïveté je me suis lancé dans le milieu de l’entrepreneuriat, en m’endettant sur plusieurs années. Mon entreprise proposait à la vente (vente au détail et à distance) des articles de sports extrêmes, des vêtements, des baskets, des vestes et d’autres vêtements techniques pour les sports d’hiver, le vélo et pour la moto (avec des marques telles que DC shoes, Fox Racing, Volcom, etc).
Cette entreprise avait une identité, une âme, elle a été créée parce que mon activité représentait un état d’esprit, un style de vie, c’était la base même de ma motivation et de mon ambition, partager cette façon de vivre, la culture musicale, vestimentaire, sportive qui tournait autour et tout ceci se reflétait au travers des marques avec qui je collaborais.
La création d’une communauté
Pour bien faire et avec la complicité d’un ami rencontré pour l’occasion, nous avions lancé en 2006 une association à but non lucratif via laquelle ont été investis plusieurs milliers d’euros de subventions régionales pour créer une des plus grandes structures de glisse indoor du Grand Est (skate, roller, bmx). Un excellent moyen de pouvoir dynamiser et promouvoir mon entreprise. J’ai toujours été seul, avec ma détermination sous le bras pour tout mettre en place, mais heureusement pour cette fois j’ai pu compter sur la volonté et le sérieux de cet ami, agent de la DGGCRF (un signe précurseur des compléments SP?) passionné de sport de glisse, d’Aïkido, moniteur snow à ses heures perdues, bref, un sportif accompli, et quelqu’un qui consacrait tout son temps libre aux autres via le sport.
Des heures à la mairie il en a passé à négocier pour tout et n’importe quel morceau de balais, ~6 ans c’est ce qu’il aura fallu pour arriver à la finalité souhaitée. C’est à dire un espace de 2000m² dédié et équipé à la pratique de différents sports avec le maximum de confort et de personnalisation possible, nous permettant le maximum de possibilités de développement. A partir de là, nous avons mis des événements en place, comme par exemple un festival de musique qui avait lieu une fois par an, pour lequel le jour même il y avait toujours des surprises, et il n’était pas impossible que l’on nous interdise les concerts pour des raisons de sécurité routières ou autres raisons improbables, mettant toute l’organisation à la poubelle à la dernière minute. Parce qu’au fond, personne n’aimait soutenir une structure sportive de jeunes ambitieux faisant la promotion de sports extrêmes, qui n’étaient pas considérés comme des sports par les politiques en place.
Développement de l’offre et de la demande pour rentabiliser son entreprise
En parallèle à la structure associative et à l’opportunité que cela représentait, je développais une toute nouvelle gamme de matériel technique : skate, snow, longboard, bmx, etc prenant un risque financier supplémentaire. Les pratiquants devaient s’équiper et entretenir leur matériel, de là, j’espérais dynamiser mon activité commerciale et travailler avec des produits plus intéressants et plus techniques.
Les années ont passé, le commerce étant ce qu’il est, malgré les nombreux investissement annexe à l’entreprise, il y a eu de bonnes années et des années médiocres jusqu’à l’apparition des sites en lignes Portugais avec des prix discount bradant toute l’année à -30 %. Des tarifs que nous ne pouvions pas appliquer en France pour des raisons évidentes (RSI, assurances, loyer élevé, taxe pro, faibles marges), à l’instar de ce qui s’est passé avec les sites de compléments alimentaires en 2015.
Le comportement des consommateurs changea rapidement. Au lieu que ces derniers viennent me commander leur nouveau BMX, ils commandaient en ligne à l’autre bout de l’Europe. Quant à leurs baskets, ils venaient les essayer pour connaître leur pointure, puis les commandaient en ligne. Du fait que j’avais crée toute une communauté autour de l’association et de l’entreprise, que nous nous fréquentions régulièrement, il était devenu banal qu’on me fasse part des achats que les uns et les autres faisaient à l’étranger via ces sites de vente. J’avais donc pleinement conscience du changement de paradigme, je pensais pourtant l’endiguer avec l’âme du magasin, la qualité de mes produits, la qualité de mes services et la vie associative.
Pendant ce temps, à coup de camping à la mairie, la structure indoor avait évolué, acquérant de nouvelles rampes et autres modules offrant aux utilisateurs toujours plus de possibilités sportives. Après plusieurs années, on nous avait enfin installé un baraquement préfabriqué neuf qui contenait des toilettes, le luxe, même le club de foot n’en avait pas eu autant, et les membres de l’association du Kayak avec qui nous partagions la structure couverte de 4 000m², nous jalousaient.
Évolution de la communauté
Les parents qui n’avaient pas confiance en nous au début, ont finalement trouvé une utilité à la structure, venant le samedi à 14 h déposer leurs enfants (telle une garderie) pour venir les récupérer au soir. Inutile de vous dire que ces parents ne sont pas ceux qui ont aidé lors des événements organisés, ce ne sont pas ceux qui sont restés entre midi lors d’événements pour y prendre leur repas et favoriser la caisse de l’association, ce ne sont pas eux qui favorisaient mon commerce pour s’y habiller ou s’y équiper, mais ce sont ceux qui étaient les premiers à se plaindre d’une ouverture trop tardive, et de frais trop importants (de mémoire c’était 40 € à l’année avec assurance et 2 € pour l’après-midi), ce sont eux qui avaient toujours quelques choses à redire parce que les jours d’accessibilités ne leur convenaient pas, ce sont eux qui préféraient faire 40 km pour aller chez un concurrent, uniquement par réflexe d’achat ou pour satisfaire leur syndrome d’acheteur délicat (toujours à la recherche de ce qui n’existe pas). Syndrome comparable d’une certaine manière à celui des consommateurs de compléments, qui pour certains, sont toujours à la recherche DU supplément miracle, commandant à gauche à droite, testant inlassablement quels BCAA seront meilleurs que d’autres sont vraiment comprendre que le goût n’a pas d’importance dans l’efficacité (et pourtant c’est toujours ce qui compte le plus).
Les clients qui jonglaient entre magasin et association s’étaient familiarisés (sûrement dû au temps passé ensemble), ce qui avait fait tomber les barrières du respect, à me considérer comme riche pensant à tort qu’une basket vendu 80 €, à colporter des rumeurs, à vouloir négocier les prix, à se plaindre de mes tarifs, à vouloir très fréquemment échanger des produits qu’ils avaient déjà utilisés et parfois même à s’organiser des commandes groupées en ligne pour les membres de l’association, sans considérer un instant que tout ceci n’existait que parce que je le voulais bien.
Mon implication dans la musculation (un sport tout aussi incompris que les sports extrêmes) dans tout ça n’aidait en rien et laissait encore plus de place à des mythes et légendes sur ma vie. Quand j’ai transformer mon activité en une activité uniquement consacrée à la logistique et à l’eCommerce, des membres de l’association se sont trouvés une passion à me reprocher mes décisions passées et à venir, au lieu de me soutenir dans mes nouvelles ambitions, persuadés que j’allais échouer dans mes nouveaux projets.
En 2013 en démarrant mon activité de logistique avec SuperPhysique, mon capital temps était déjà bien entamé, ayant donné beaucoup de ma liberté, de mon temps personnel, pendant presque une décennie, pour voir les gens profiter de tout, ne jamais aider et rarement soutenir les projets en cours. Je ne comptais jamais mes heures, sans jamais de vacances (3 semaines de fermeture en 9 ans). Des mois sans salaire j’en ai connu quand il fallait réinvestir et suivre les lois du marché (comme au lancement de mon nouveau site en ligne en 2010 – 10 000 € mis bout à bout entre développement, hébergement et maintenance informatique), rien d’étonnant et plutôt positif quand il y a un retour à la hauteur du développement, ce qui n’était pas forcément le cas ici.
Capital temps et rentabilité de son entreprise
Je m’étonne d’avoir retrouvé en 2013 aussi rapidement de l’énergie pour développer la boutique SuperPhysique qui me tient tant à cœur, mes ebooks, mon site, mon forum, poussé par la réussite de mes collaborateurs et la passion de la musculation. Je me réinvestissais partout, alors que je m’étais promis d’appliquer la règle des 80/20. Une règle qui sur papier est jolie, mais difficile à appliquer quand on est passionné… et je m’y suis déjà perdu une fois.
Toutefois, aujourd’hui, j’ai décidé de m’y tenir ne voulant pas retomber dans mes travers pour refaire un tel bilan à l’avenir. Les heures consacrées ces dernières années à toutes ces tâches dépassent toute mesure logique et sensée, et je me demande bien ce que j’aurai pu accomplir si on m’avait contraint aux 35 petites heures par semaine, sans doute serais-je encore entrain de créer le logo de mon site.
A la parution de l’article sur la Vitamine B9, Laurent Buhler Diététicien avec qui j’échange souvent, m’a félicité de la qualité de son contenu et m’a demandé comment j’avais fait pour rassembler autant d’éléments en si peu de temps. C’est pourtant simple, en faisant de cette tâche une priorité j’ai travaillé jusqu’à y mettre un terme quoi que m’en coûte les heures, quitte à manger sur mon clavier et a ne pas en dormir.
Pour les autres articles, j’ai travaillé en extra de mes responsabilités de SP Nutrition et de mes élèves, c’est à dire tous les jours de tôt le matin à tard le soir en sacrifiant mon temps libre. Il n’est pas ici question d’organisation, que l’on soit organisé ou non, quand on est investit sur plusieurs fronts, si vous n’êtes pas organisés vous coulés directement, si vous l’êtes, alors vous travaillerez tout le temps pour tout finir, sans quoi vous n’arriverez jamais a rien (à l’inverse de ce que les bloggeurs véreux veulent vous faire croire – « comment se dégager un salaire supplémentaire en un week-end » – sujet qui sera traité dans un prochain article).
Sans ces efforts, il m’aurait été impossible de publier autant de contenu et d’aider à développer la marque SuperPhysique à tenir mes tâches logistiques quotidiennes qui me demandent une disponibilité permanente. C’est aussi pourquoi je ne me suis jamais éparpillé, sur Youtube ou d’autres supports par manque de temps et sans doute d’énergie, car le temps n’est pas illimité, mais l’énergie non plus. C’est un point sur lequel j’ai par ailleurs souvent insisté. Il est difficile de devenir un « expert » dans ce qu’on entreprend si on se dissipe sur des dizaines d’activités. Il est peut probable d’exceller sur différents fronts, simplement par faute de temps. Voulant être partout, on est finalement nul part.
Je sens bien qu’avec l’expérience, avec le faible enthousiasme dont la communauté a fait preuve ces derniers mois, une fois que mon travail logistique est achevée et suite à l’historique que je viens de vous raconter, j’ai de moins en moins envie de m’exposer publiquement (j’ai d’ailleurs déjà réduit mes publications sur les réseaux sociaux), bien que cela ne m’a jamais attiré, c’est un mal nécessaire de notre époque (on peut se le demander). Je suis encore moins enclin aujourd’hui à accepter une collaboration. Les événements passés via lesquels on a cherché à nous décrédibiliser m’ont conforté dans ce choix.
« Vivre caché, c’est vivre heureux » me dit souvent Fabrice (mon collaborateur).
Pour revenir à cette histoire intéressante de capital temps, le mien est bien entamé sans que je me sois enrichi à hauteur du temps dépensé et sans que je vive mieux. Il est l’heure de faire quelques réglages, la priorité étant la gamme de compléments SuperPhysique, ainsi que le temps consacré à ceux qui me font et me feront confiances pour leur suivi personnalisé.
COMBIEN DE TEMPS ACCORDER A LA RENTABILITÉ DE SON ENTREPRISE – LE RÉCAPITULATIF
1) Ne jamais considérer l’entrepreneuriat comme l’unique moyen de s’enrichir.
2) Ne pas trop s’exposer personnellement – trouver ses limites.
3) Comme en musculation, en faire plus, ne signifie pas plus de gains.
4) Savoir canaliser son énergie et mieux la restituer.
5) Ne pas perdre trop de temps dans des tâches qui ne vous apportent ni plaisir, ni argent.
6) Trouver un moyen de faire évoluer votre entreprise en préservant un capital liberté qui vous convient.
7) Ne pas croire qu’avoir toutes les qualités requises pour gagner font de vous un gagnant.
8) Les investissements complexes ne sont pas synonyme de meilleure rentabilité.
9) Minimiser coûte que coûte l’investissement de départ et les coûts de fonctionnement.
10) Faire le maximum par vous-même.
11) Les personnes a qui vous accordez le plus de temps (et les plus proches) sont les clients les moins fidèles à vos services et souvent les pires.
12) Quand un business est rattaché à vos actions, quelques soient vos actions elles ne sont pas considérées à leur juste valeur et seront toujours considérées comme du business.
13) Ne vous fixez pas des horaires mais fixez-vous des objectifs.
14) Nous avons tous des faiblesses, tirez-en profit pour améliorer votre rentabilité.
15) Tout faire pour appliquer le point numéro 5, 6 et 9.
16) Pour ce dernier point j’aimerais vous dire que persister sur le long terme malgré vos difficultés est nécessaire, ma première expérience prouve que ce n’est pas si simple. Rendez-vous dans 10 ans pour un prochain bilan.
« rendez-vous dans 10 ans pour un prochain bilan » à dans 10 ans mec 😉
J’acte : « rendez-vous dans 10 ans » 😉