Lorsqu’il s’agit de reportage sur la musculation ou de film sur la musculation, c’est souvent un bien triste scénario qui nous est présenté. Quand on nous ne montre pas des adolescents fanatiques de la fonte qui font du curl incliné toute la journée, on nous filme des sportifs ayant des problèmes avec des produits dopants. Et pour finir on tape toujours un peu sur les suppléments alimentaires.
Les réalisateurs font tout bien pour rappeler aux gens (qui ne sont pas initiés à la musculation) tous les détails tordus qui font des passionnés de ce sport de vrais parias.
Je partage avec vous dans cet article mon opinion sur les différents reportages sur la musculation, à vous de vous faire maintenant la votre.
Sommaire de l'article :
REPORTAGE SUR LA MUSCULATION
Reportage sur la musculation et « télé réalité »
Il faut le dire, nous sommes habitués depuis plus de deux décennies a ce que l’on nous propose des reportages sur la musculation biaisés par une vision cliché de ce sport.
Pour certains les mots me manquent pour les qualifier.
J’ai de la peine pour le temps investi (gâché) à écrire et à monter de telles réalisations. J’ai conscience des efforts qu’il faut fournir pour un tel travail, c’est pourquoi je ne ferais pas ici de critiques faciles. Je comprends également la réalité du monde journalistique aujourd’hui que personne ne peut nier : un commerce.
Comme dans tout business télévisuel, il y a de la demande pour ce type de réalisation, et automatiquement il y a de l’offre. Quand il s’agit d’épisodes télévisuels, le côté « télé réalité » dramaturgique a toujours eu le dernier mot sur la vérité et la réalité du terrain. En musculation, cette tendance fait des ravages sur le montage et l’orientation des vidéos. Je vous laisse imaginer l’impact sur un public non averti qui continue aujourd’hui encore de désinformer et de propager des mythes ridicules et grotesques.
Les reportages sur la musculation sont caricaturaux
Depuis des années en France la musculation est maltraitée ou tout du moins mal présentée dans les reportages sur la musculation.
Je pense notamment à l’un des premiers documentaire que j’ai eu l’occasion de visionner (qui remonte aux années 2010), dans lequel un adolescent soutenait devant la caméra que certains suppléments alimentaires l’empêchaient d’avoir des érections quand il en prenait de trop.
Un discours d’amateur très bancal. Le réalisateur a pris soin de monter les images d’une certaine manière qui laissait penser que les suppléments sont dopants. Un ramassis de clichés, d’erreurs, d’idées fausses qui tombent sous le sens quand on sait que les journalistes s’adressent à des jeunes gens qui débutent la musculation, sans expériences, ni recul sur ce qu’ils font et ce qu’ils disent.
Plus récemment (2015), je me souviens d’une émission dans laquelle on a vu un adolescent s’entraîner à domicile faire de façon maladroite du développé couché à 50 kg sous le regard de sa mère, complètement pétrifiée par la performance de son fils. Une scène dantesque qui aurait eu sa place dans Aliens le Retour (quand les marines sortent de l’hyper sommeil – j’aurais mis la scène à ce moment là).
L’angle de vue du réalisateur était là encore fidèle aux standards du genre, mélangeant clichés et mythes sur la pratique de la musculation. La vidéo finissait sur le sujet classique du dopage avec un mec dont le visage a été flouté, à peine musclé, qui racontait son histoire avec l’utilisation de stéroïdes. Comment est-ce que ça aurait pu finir différemment me diriez-vous ?
ARTE | TOUS MUSCLÉ : LA LOI DU MUSCLE
Review
Bien plus récemment nous avons eu droit au reportage sur la musculation (publié initialement le 27 avril 2020 sur Youtube) intitulé : Tous musclé : la loi du muscle.
A quelle soupe allons-nous encore être mangés, c’est la question que je me suis posé avant de lancer la vidéo. Surprise, pour une fois on ne reproche rien à la créatine et on ne parle pas de dopage.
Par contre, on nous montre que des dopés tout droit sortis du Gold’s Gym !
Nous avons droit à une analyse type politico-philosophique, économique et pseudo-psychologique (faisant référence au nazisme et au communisme pour vous dire) du monde du muscle et plus particulièrement de l’évolution du bodybuilding dans la société (cf. évolution de la nutrition et de la musculation).
Des sujets que beaucoup de spectateurs ont jugé beaucoup trop « perchés », tenus par des intervenants qui pour certains ont une vision bien arrêtée du bodybuilding.
Un angle de vue Américanisé de la musculation
L’angle de vue des réalisateurs sont souvent trop influencés par la pratique Américaine, avec majoritairement des références étrangères (USA). Dans ce dernier reportage les références US sont faites tout au long de la vidéo, pour finir le reportage à Muscle Beach. Comme si Muscle Beach était une préoccupation pour tous les pratiquants de musculation, ce sont en effet des images fréquemment utilisées pour illustrer des vidéos sur la musculation.
Même si Muscle Beach fait partie de l’histoire, notamment en partie à cause d’Arnold Schwarzenegger, pour moi cela ne reflète pas la pratique de la musculation actuelle que je cherche à promouvoir.
J’aurais préféré que l’on s’attache à parler de la musculation en France, avec des références Françaises auxquelles on peut s’affilier en tant que passionnés naturels (sans dopage), qui sommes bien loin d’Hollywood et de son univers qui lui est propre.
Même si la plupart des intervenants sont Français, les transitions sont très très contrastées. Les coupures sont rapides, les gens s’expriment et l’image passe vite à autre chose, gardant ainsi un certain dynamisme qui n’est pas mauvais en soi, mais limite le contenu.
D’un côté on fait parler un anthropologue qui n’a sans doute jamais mis les pieds dans une salle, qui a des idées bien à lui sur les culturistes, pour transiter sur une photo de Jay Cutler (cf. https://fr.wikipedia.org/wiki/Jay_Cutler_(culturiste))au meilleur de sa forme. Je ne me retrouve pas forcément dans ces quelques passages.
Que dire quand ce même anthropologue dit que les muscles que développent les sportifs en musculation ne servent ni à pousser, ni à courir, ni à sauter et seulement à paraître ?
Lui-même se demande à quoi servent tant de muscles, on comprend alors rapidement qu’il a une idée bien arrêtée sur la musculation. Il fait ici référence aux bodybuilders dopés des podiums, la seule référence qu’il a en mémoire des pratiquants de musculation.
Heureusement la musculation ne s’arrête pas aux podiums (aurait-il fallu le préciser). Vous n’êtes pas censé ignorer que toutes les athlètes à ce jour ont des programmes de musculation poussés pour améliorer leurs performances. Il est inutile de citer les Rugbymans, mais les footballeurs, les nageurs, les combattants, les sprinteurs, comment peut-on ignorer l’importance de la musculation au sein du sport en général et de l’importance du développement musculaire et de la force ?
Là encore les mots me manquent.
A la place, j’aurais préféré entendre plus les différents intervenants Français (Enzo Foukra et Bionic Body) sur le sujet de l’évolution de la pratique en France. En soi les athlètes Françaises ont bien parlé mais de façon très succinctes. On y notera l’intervention de Jérôme Petit (entraîneur de l’équipe de France de bodybuilding naturel) qui a été pas mal repris dans les critiques notamment pour le passage où il soutient les performances que peuvent afficher des sportifs sans dopage par rapport aux sportifs dopés en compétition. Pour moi c’est un peu hors du temps car on a du mal à croire qu’il reste des athlètes naturels sans dopage sur des podiums de grosses compétitions.
Hollywood et le bodybuilding
Le paraître, le contrôle, la recherche de la perfection, Hollywood, le vieillissement des sportifs, tous ces points sont abordés. Un travail d’analyse du monde de la musculation est proposé tout au long du documentaire, qui est uniquement rattaché à une certaine idéologie Américaine en ne montrant en prime que des pratiquants dopés. Cela devient très énervant de voir toujours les mêmes stéréotypes utilisés pour raconter la musculation.
Ceux qui veulent voir de l’action sur le terrain et se motiver vont se tirer une balle dans le pied. Ce documentaire cherche à prendre du recul avec l’histoire du bodybuilding, en restant à mon sens sur une base idéologique qui ne prédomine plus la musculation d’aujourd’hui. Arnold Schwarzenegger et tout le lifestyle qu’il englobait a fait son temps, et il n’est plus l’égérie des milléniums.
Enfin, mon camarade Nicolas Chemla auteur de « Monsieur Amérique » (livre qui retrace la vie du bodybuilder Mike Mentzer) y est un des intervenants récurrent et apporte un contenu historique que lui seul pouvait partager au vu du travail d’archives réalisé pour l’écriture de son livre. Non seulement il s’entraîne, et de part son travail d’écriture il est une mine de connaissances quand il s’agit de parler de l’histoire du bodybuilding, en commençant par la création des haltères tout en passant par le succès d’Eugène Sandow (premier « bodybuildeur » de l’histoire). Pour ses interventions, la vidéo en vaut le coup.
REPORTAGE SUR LA MUSCULATION MON MOT DE FIN
Pour conclure, ce dernier documentaire « Tous musclé : la loi du muscle » est l’unique réalisation Française qui à ce jour a cherché à intellectualiser le sujet du bodybuilding (ne pas s’y méprendre, je n’ai pas dit qu’il a cherché à intellectualisé la pratique de la musculation) en le sortant du carcan « adolescent – suppléments – dopage« .
C’est un mérite que je me devais quand même de préciser, ça vaut ce que ça vaut.
Sont-ils allés trop loin dans leur approche explicative de l’évolution du bodybuilding, c’est sur. Les intervenants avaient-ils tous leur place dans ce reportage, non c’est certain.
Comme pour de nombreux reportages sur la musculation, beaucoup (trop) de questions restent en suspend, et on reste sur notre faim. La façon dont sont réalisés ces documentaires nous montrent encore et toujours que de mauvais repères sont profondément ancrés dans la vision qu’ont les gens de la musculation. Au travers une ancienne idéologie dépassée inlassablement utilisée comme base pour expliquer la pratique du bodybuilding (aka Schwarzenegger, aka gonflette, aka Hollywood, aka pratiquants ultra dopés).
Dans Tous musclé : la loi du muscle nous aurons au moins appris sur l’histoire de la musculation via les interventions de Nicolas Chemla. Mais encore une fois les non avertis n’en sauront pas plus sur les véritables motivations des pratiquants de musculation naturels (santé, condition physique, performances, force, discipline de vie, mental, nutrition, etc..).
Une chose est sure, nous ne sommes pas prêts de voir des sportifs naturels en musculation sur le petit écran. L’image du culturiste un peu benêt faisant de la gonflette n’a pas dit son dernier mot !
70
Leave a Comment