Suite à la publication de mon article : whey native = fumisterie pour tout savoir sur la whey, j’ai le plaisir d’avoir été contacté par un fabricant de whey protéines avec qui j’avais déjà eu un échange professionnel il y a quelques années. Après à un bref retour de mails, j’ai convenu avec lui d’une interview.
Il accepta la demande à condition de rester sous le couvert de l’anonymat. Exerçant toujours dans le milieu de la nutrition, il a préféré ne pas s’attirer les foudres de guerre, même si sa participation est restée très correcte, sans véritable déclaration choc. Le fabricant de protéines s’appellera donc « A » dans l’interview qui va suivre.
« A » occupait pendant plusieurs années un poste d’ingénieur agroalimentaire dans la multinationale **** (dont je ne suis pas autorisé à le citer) qui comptait en 2018 quelques 1800 employés, pour 1 715 millions d’euros de chiffre d’affaire. Ce fabricant est l’un des principaux distributeurs d’ingrédients alimentaires et nutritionnels en Europe, en Asie-Pacifique et en Amérique. Leurs capacités alimentaires et nutritionnelles couvrent tous les segments de marché clés : Boulangerie, boissons, confiserie, laitier, huiles et graisses comestibles, fruits et légumes, nutrition, fabricants d’ingrédients alimentaires, etc.
Cette société fournit également une gamme complète d’excipients, d’ingrédients pharmaceutiques actifs, de solvants spécialisés, de produits chimiques de traitement et d’intermédiaires pour la formulation et la synthèse chimique. C’est le distributeur numéro un dans le monde d’ingrédients pharmaceutiques spécialisés.
Cette interview répondra à toutes les questions que vous vous posez sur la fabrication de la whey, les différences entre whey native, bio, classique, laitière et fromagère.
Sommaire de l'article :
TOUT SAVOIR SUR LA WHEY : INTERVIEW D’UN FABRICANT DE PROTÉINES
Pouvez-vous vous présentez aux lecteurs ?
Je suis ingénieur agro et j’ai longtemps commercialisé et fait fabriquer divers type de protéines laitières pour de nombreux secteurs de l’alimentaire. Sans prétention, j’ai effectivement un peu de recul technique sur les wheys protéines.
J’ai rarement envie de m’exprimer mais exceptionnellement, je voulais juste vous féliciter pour votre post : intelligent, techniquement précis et surtout correct. Je suis très souvent habitué à lire des approximations ou de réelles erreurs à vue de simplification ou de vulgarisation, et ce que je viens de lire « fait du bien » ;-).
Est-ce que vous pouvez me parler du blanchiment de la poudre de lactosérum ?
Concernant le blanchiment de la whey, il est encore difficile d’avoir un avis sur un éventuel risque sur ce type de traitement. L’adjonction de peroxyde de benzoyle ou de peroxyde d’hydrogène (eau oxygénée) va avoir une action sur le beta-carotène qui colore naturellement le lactosérum.
A titre personnel (donc cela n’engage que moi) quel intérêt de rechercher une protéine de lactosérum très blanche, mais ayant subi l’ajout d’un produit qui ne se trouve pas naturellement dans le lait, plutôt qu’une protéine de lactosérum légèrement colorée par du béta carotène présent naturellement et totalement inoffensif.
Si c’est juste parce que l’on pense que : plus c’est blanc plus c’est pur, c’est une approche qui peut se révéler parfois un peu erronée. Et si la couleur est la seule motivation, n’est-il pas plus simple de rester sur un produit sans traitement et légèrement coloré?
Mais je précise à nouveau que je ne suis pas à même de dire si cela présente un quelconque risque d’ajouter du peroxyde.
Pour quelle raison les industriels utilisent ce procédé alors que les clients l’évitent ? Peut-on identifier selon la composition les wheys blanchies, et est-ce que la présence de béta carotène signifie que la whey n’a pas été blanchie ?
Les protéines de lactosérum ne sont pas uniquement utilisées pour la réalisation de complément alimentaire pour sportifs.
Dans la production d’autres produits alimentaires, il peut être demandé aux industriels qui fabriquent la whey de leur proposer un produit blanc car sinon cela a une incidence sur la couleur de leur produit fini qui peut être plus terne.
Les additifs utilisés pour le blanchiment de la whey sont utilisés en tant qu’auxiliaire technologique. Selon la réglementation européenne, les auxiliaires technologiques ne sont pas soumis à un étiquetage. Donc, vous ne pourrez pas les voir sur la composition du produit fini. Vérifier la composition ne pourra pas vous dire si la whey a été traitée ou non.
Et effectivement, la présence de béta carotène ne sera pas un indicateur assez précis pour savoir s’il y a eu traitement ou non.
Le seul moyen de savoir si la whey a été traitée est de le demander au fournisseur (sans garantie de réponse).
Que la whey soit d’origine laitière ou fromagère, y-a-t-il vraiment une différence de qualité du produit fini, blanchiment ou non ?
Concernant la whey laitière ou fromagère, la différence reste minime.
Du fait du process différent qui va conduire à l’obtention de ce coproduit il va y avoir une légère différence de teneur en minéraux, de pH et d’acide aminée (principalement Leucine : whey laitière un peu plus riche).
Des différences faibles qui n’auront pas vraiment d’impact sur les résultats que l’on peut attendre dans la nutrition sportive.
Use-t-on de beaucoup d’additifs pour la fabrication du fromage, et si oui, peut-il en résider des traces dans une whey protéine si celle-ci est issue de la fabrication du fromage (y-a-t-il une traçabilité, des contrôles) ?
Avant tout, je tiens à signaler que je me réfère à des produits achetés à des fournisseurs principalement européens, selon des techniques de production européennes. Je ne connais pas la qualité de produits pouvant provenir d’origine plus « exotiques » et dont la qualité et le contrôle ne suivent pas la réglementation européenne.
Pour ces origines, le prix peut éventuellement être attractif mais pouvant présenter des inconvénients exemple : laits américains contenant des hormones de croissance autorisées dans ce pays, des additifs autorisés dans des productions asiatiques et non disponibles en Europe.
Non en Europe, la fabrication de fromage n’implique pas l’utilisation de beaucoup d’additif. Principalement est utilisé une enzyme (présure) et de ferments lactiques totalement sans danger et utilisés depuis des générations.
Pour tout savoir sur la whey est-ce que les normes de fabrication (et les normes de contrôles) qui régissent la production de whey sont les mêmes entre protéines laitières et protéines fromagères ?
Pour les produits européens, les normes, les contrôles sont définis et performants. Sauf problème particulier (mais généralement on est largement informé et les produits retirés des circuits de vente) il n’y a pas de risque.
Il faut garder dans l’idée que la whey est très largement utilisée dans l’industrie agroalimentaire et elle impose des contrôles rigoureux car achetés par de très grandes entreprises qui ne peuvent pas se permettre de prendre de risques sinon très dommageable. La whey pour la nutrition sportive est la même et donc bénéficie de ces mêmes contrôles lors de la fabrication.
On sait maintenant que la qualité du produit fini est quasiment identique. Je peux donc en conclure que ces nouvelles modes de whey dites « natives » ou « non dénaturées » sont une vaste fumisterie, ou tout du moins elles peinent à mettre en avant la faible différence de valeur nutritionnelle qu’il pourrait y avoir probablement entre une whey fromagère et une whey laitière, je me trompe ?
Pour ne froisser personne, je ne vais pas dire que c’est une vaste fumisterie mais qu’il y a une part importante de marketing. Vous savez bien que l’influence d’un bon discours marketing s’appuyant sur quelques notions techniques + un packaging élaboré et une photo d’un sportif très bien choisie va orienter l’achat vers un produit plutôt qu’un autre.
Donc il est à mon avis inutile de se focaliser sur le fait de savoir si c’est une whey fromagère ou laitière mais de plutôt regarder la composition de la whey concernant la quantité de protéine, de vitamines, etc.
Il y a en plus de ces wheys natives des wheys « bio » qui voient le jour sur le marché au double du tarif d’une poudre classique. Peut-on vraiment espérer une moins grande contamination de ces produits ou bien là aussi sommes-nous fasses à des techniques marketings ?
Je ne connais pas bien les wheys bio. Mais d’une manière générale en alimentation humaine le terme bio peut correspondre à des produits intéressants mais malheureusement aussi à des pièges marketing. Mais c’est un autre débat complexe.
Y-a-t-il une traçabilité des matières premières utilisées, ou sont utilisés plusieurs laits d’arrivages mondiaux pour la conception d’un même produit ?
En Europe, nous importons peu ou pas de lait pour ce type de production.
Récemment, un confrère parlait de gros volume de whey invendus congelés et bradés à petit prix aux fabricants de suppléments, est-ce une pratique réelle, un mythe, est ce fréquent, est-ce que la congélation impacte la qualité ?
Il peut effectivement avoir de forte fluctuation de volume de whey et donc des périodes de stockage important.
Mais la whey est généralement stockée en poudre, en sacs et donc pas de nécessité de la congeler, je ne vois pas trop l’intérêt de la stocker sous forme liquide car constituée essentiellement d’eau, très volumineux dans des citernes et sous froid ce serait économiquement aberrant.
Sinon d’une manière générale la congélation n’a pas impact sur la qualité d’un produit.
Vous avez dit que nous n’avons aucun moyen en tant que client de savoir si nous achetons une whey d’origine fromagère ou laitière, quand est-il des fabricants ?
Les industriels qui achètent de la poudre de lactosérum ont la possibilité de connaitre l’origine du lactosérum (laitier ou fromager).
Mais cela ne veut pas dire qu’ils s’approvisionnent uniquement avec un seul type de lactosérum (en fonction des prix et de la disponibilité de cette matière première) ou qu’ils ne mélangent pas ces deux origines pour la fabrication d’un produit fini.
La traçabilité de l’origine du lactosérum sera donc soit facile soit quasi impossible.
Votre avis perso sur la whey protéine, est-ce un supplément que vous consommeriez vous même après avoir vu ce qui se passe en coulisse ?
N’ayant pas de problème pour consommer des produits d’origine animale, je n’ai aucune réticence à consommer de la whey. Cela reste la meilleure source de protéine animale à absorption rapide et comme pour tous produits alimentaires il faut bien lire les étiquettes afin de faire son choix et mettre à distance le discours commercial et marketing qui peut parfois être légèrement trompeur.
Cela suscite une dernière question. Sur le marché Européen, y-a-t-il beaucoup fournisseurs de matières premières au niveau des protéines en poudre ?
Je comprends que les lactosérums soit un sujet important dans les secteurs du sport, de la musculation ou du contrôle du poids. Mais il ne faut pas oublier que nous ne parlons que de protéines laitières, un produits relativement simple à produire, peu complexe dans sa composition (presque essentiellement des protéines), et même si les différences entre un producteur et un autre existent et sont importantes (qualité de la matière première, rigueur dans le process, bons contrôles qualité et de traçabilité,…) cela doit être relativisé.
Comme je vous le disais il est important de bien regarder les étiquettes : voir la teneur en protéines, en acides aminés essentiels, en vitamines. En fonction de la qualité des protéines, du process,… le goût peut être différent (bien que les arômes utilisés peuvent masquer ou améliorer cet aspect), leurs solubilités également peuvent être impactées (qui est parfois améliorée par l’ajout de lécithine par les producteurs par exemple), leurs digestibilités qui pourra être différentes en fonction des individus.
Ces critères sont à prendre en compte par les consommateurs pour décider quelle est la whey qui leur convient le mieux.
Effectivement chaque producteur de whey va défendre son produit, vouloir le démarquer de son concurrent et montrer qu’elles ont des avantages. Je ne dis absolument pas qu’ils mentent et je suis d’accord qu’il existe de petites différences : mais concernant les 4 ou 5 principaux fabricants européens ces différences restent limitées.
Comme vous avez pu le constater, il existe 4 ou 5 grands producteurs de protéines plus un petit nombre de fabricants plus modestes (ce qui n’est pas si mal, car certains secteurs de l’industrie agroalimentaire sont plus concentrés) donc la whey proviendra essentiellement d’eux. Et je ne pense pas qu’il fasse avoir des doutes sur la qualité de leurs produits.
Donc comme je le disais dans notre premier échange, je trouvais intéressant votre article revenant aux fondamentaux et expliquant des vérités simples et très éloignées des messages à sensation.
TOUT SAVOIR SUR LA WHEY : INTERVIEW D’UN FABRICANT DE PROTÉINES – CONCLUSION
Faut-il acheter une whey native, bio, ou un concentré de whey ?
Il semble évident que pour l’heure cette histoire de whey native non dénaturée, de peroxyde et autres wheys fromagères ne justifie pas un tel engouement et une telle réflexion.
Les différences de qualités qu’offrent les wheys entre elles sont finalement parfois assez infimes et ne justifient pas tout ce mélodrame en vogue sur le marché depuis quelques années.
De plus, on est à même de constater qu’il peut y avoir des difficultés quant à la traçabilité des produits et à en comprendre le cheminement exact.
J’ai bien peur qu’à votre niveau (et même au mien en tant que professionnel) vous ne pouvez savoir précisément ce que vous consommez (qualité de la matière première, sa provenance, son façonnage, etc..). Mais ce n’est que mon avis. Vous avez lu tout comme moi les réponses de A, je vous laisse en tirer vos propres conclusions.
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Bonjour Loic.
C’est parfait.
Aurais tu une idée du taux d’assimilation en pourcentage d’une whey concentrée par rapport à une native?
Merci de ta réponse
Eric
Bonjour Eric,
Du taux d’assimilation ?
Si tu as 30 g de protéines que ce soit dans une whey native ou dans un concentré de whey, les 30 g seront digérées.
Bien à toi.
Bonjour Loic.
Je pense que ce qu’il faut retenir c’est que les protéines en poudre ne restent que des suppléments.
D’après l’interview de A. on peut on en conclure qu’un concentrat de whey même obtenu par filtration par la chaleur aura une efficacité indéniable.
Si je mange un bol de fromage blanc je peux dire que c’est une proteine complète native.
Les protéines en poudre servent à compléter ta ration journalière et n’ont rien de magique. Ceux qui en consomment beaucoup doivent se poser la question .
Merde , j’en ai consommé des kilos et des kilos et je n’ai pas pris pour autant des kilos et des kilos de muscle
Quand j’ai commencé la muscu, il y avait peu de marques disponibles et en plus c’était très cher comparé à aujourd’hui.
Les poudres weider ( du caseinate de calcium)étaient d’une couleur jaunâtre et sentaient mauvais, ils étaient obligés de rajouter des tonnes de parfum pour masquer tout ça, la qualité de celles ci étaient je pense moindre que celles d’aujourd’hui même chez les fournisseurs low cost et on ne se posait pas de questions.
De nos jours est ce que cela vaut le coup de payer 40 euros 1 kg de whey native de super qualité pour se complementer autant manger de la vrai nourriture.
Merci encore pour toutes tes informations.
Eric
Bonjour Eric,
Tu as utilisé les bons mots pour résumé ce que l’on pourrait faire comme bilan de cette interview.
Il faut que le consommateur reste conscient qu’ajouter des doses de wheys revient également à ajouter des calories et donc possible prise de poids.
En tout temps il a toujours été mieux de manger du solide.
Maintenant une whey dont la composition n’est pas bourrée d’additifs reste un bon équivalent dont il faut pas non plus se poser milles questions.
Il ne faut pas oublier que nous avons tous majoritairement commencer notre vie à boire du concentré de whey que l’on retrouve dans tous les laits pour bébé qui ne sont pas allaités par leur mère.
Nous nous portons très bien pour autant que je sache 😉
Comme toujours, varier son alimentation non industrielle, éliminer les excès restent les meilleures recommandations.
Bien à toi.
Bonjour Loic.
C’est vrai qu’en ce moment la mode est au whey native.
Le marketing veut que cette whey soit tirée directement du lait frais et c’est vrai en tant que consommateur ça peut rassurer.
Les différentes marques disent que celle ci est produite par filtration céramique à froid contrairement au concentrat qui est chauffé et que les acides aminés contenu dans celui ci n’aurait plus le même pouvoir nutritif et pourtant ces marques en on vendu pendant des année.
Nous auraient elles mentis?
Après avoir lu cette interview on peut en conclure que toutes les whey vendues en France et dont la matière première vient des industriels européens sont bonnes à prendre natives ou non?
Decathlon vend un isolat dont la matière première vient de laiteries européenne et labellisee grasse fed c’est à dire ( vaches nourries à l’herbe).
Évitons donc la whey chinoise mais sauront nous qui la produit?
Merci pour tes articles.
Eric
Bonjour Éric,
« NATUVE » est un terme commercial qui a commencé a désigner des wheys il y a 4, 5 ans alors que certaines du même acabit étaient déjà en vente depuis une décennie. Si tu cherches tu verras que chez Scitec par ex. l’Iso Great est filtrée de la même manière (céramique a froid). Elle était déjà en vente en 201z. C’est en fait seulement une communication commerciale qui a évolué au fil des années. L’interview permet de mettre en avant un bilan optimiste : la whey est un supplement qualitatif dont les nuances qualitatives se font surtout dans les compositions (arômes, additifs, mélanges, etc..). Concernant leur provenance cela ne nous permet pas d’émettre un jugement aussi catégorique. Ce n’est pas si évident que cela le semble.
Bien a toi,
Loic.